Gravir une montée, c’est un peu comme jouer au poker avec ses jambes : si tu mises trop fort au début, tu finis à sec avant le sommet — et sans même un as dans la manche.
Combien de fois t’es-tu juré de “partir tranquille”, avant de te retrouver à 400 W au pied, excité comme si c’était l’Alpe d’Huez sur le Tour ? (Spoiler : tout le monde fait pareil.)
Heureusement, les capteurs de puissance ont mis fin à ces “montées à la sensation” — autrement dit, à la roulette russe du pacing. Avec les watts, fini les illusions : c’est la donnée qui commande. Reste à savoir comment l’utiliser intelligemment pour monter vite, sans finir en mode survie sur la fin.
Le pacing, ou l’art de ne pas se griller trop tôt
Le pacing, c’est la gestion de ton effort dans le temps. Simple à dire, difficile à faire. Un mauvais pacing, c’est quand t'as le cœur dans la boîte à gants à mi-parcours et que tu finis en priant pour que le sommet arrive avant la fringale.
Les capteurs de puissance changent la donne : ils te disent ce que tu produis vraiment, pas ce que tu crois produire (désolé pour ton ego). Les sensations mentent, la puissance non. Même ton cardio est influencé par la chaleur, la fatigue, ou ton troisième café. Les watts, eux, ne mentent jamais — un peu comme la balance du lundi matin.
Définir ta puissance cible : le FTP, ou ton “score de vérité”
Avant de parler pacing, il faut connaître ton FTP (Functional Threshold Power en bon français ou Puissance au seuil fonctionnel) — cette puissance que tu peux tenir une heure quand tu es en forme, motivé, et que Netflix ne diffuse pas une nouvelle saison de ta série préférée.
Ensuite, adapte ta puissance selon la durée de la montée :
- Montée courte (<5 min) → 110 à 130 % de FTP : tu peux te permettre de “mettre des watts”, mais pas de t’inventer grimpeur.
- Montée moyenne (5 à 20 min) → 95 à 105 % de FTP : c’est la zone où tu peux jouer à équilibriste entre “solide” et “au bord de la rupture”.
- Montée longue (>20 min) → 85 à 95 % de FTP : ici, c’est de la patience et de la discipline. Pas de place pour les excès de confiance.
Analyse aussi le profil : une montée en escalier se gère différemment d’un long col régulier. Strava ou Komoot sont tes amis (jusqu’à ce qu’ils te rappellent que le “faux plat” faisait en fait 8 %).
Construire ton pacing : la symphonie des watts
Le secret du pacing parfait ? Être régulier… mais pas rigide. Voici la partition idéale : Au pied de la montée : calme. Ignore les excités qui te doublent en danseuse à 450 W — tu les retrouveras plus tard, visage gris et regard vide. Reste un peu sous ta cible, le temps que ton moteur chauffe. Sur la pente régulière : stabilise autour de ta cible. Utilise le power average 3 s pour lisser la lecture, sinon tu vas passer ton temps à insulter ton compteur. Sur les passages raides : tu peux monter un peu, genre 105 % de ta cible, mais pas plus. Si tu dépasses 110 %, c’est que tu attaques un KOM… ou une fringale. Sur les replats : relâche légèrement la pression, sans t’endormir. C’est ton mini “pit stop” énergétique. L’objectif : arriver en haut encore capable de sourire sur la photo, pas de chercher de l’oxygène comme un poisson hors de l’eau.
Après la montée : décoder les chiffres sans devenir data scientist
Une fois en haut (et après le selfie, évidemment), viens le moment préféré des nerds du vélo : l’analyse post-mortem. Regarde la dérive cardiaque : si ta FC augmente pour la même puissance, c’est que ton corps a souffert. Observe aussi le VI (Variability Index) : plus il se rapproche de 1.00, plus ton pacing est stable. En clair : si ton VI est à 1.15, tu n’as pas fait un effort, tu as fait une montagne russe. Chaque montée devient alors un petit labo d’expérimentation : un test pour ajuster, progresser et surtout, éviter de revivre “la fringale de trop”.
Optimiser ton pacing, c’est apprendre à monter malin. Le capteur de puissance n’est pas juste un gadget pour frimer sur Strava — c’est ton coach silencieux, ton miroir honnête, ton garde-fou contre la surmotivation du départ.
Souviens-toi :
- La puissance, c’est la vérité.
- La régularité, c’est la performance.
- Et la sagesse, c’est d’accepter qu’un bon pacing vaut mieux qu’une attaque au kilomètre 2.
Alors, la prochaine fois que tu t’élances, fais un pacte avec toi-même : moins de panache, plus de watts bien placés.